jeudi 11 décembre 2014

Raymond Daussy, un peintre oublié










Autoportrait au verre d'eau, 1949
© Raymond Daussy








Né en 1918, Raymond Daussy s'est surtout fait connaître dans les années quarante, époque où il a participé aux activités du groupe Surréalisme-révolutionnaire. Sa trajectoire personnelle, pour autant qu'elle soit visible, est intéressante en ce qu'elle a intériorisé les dilemmes des peintres, des poètes de cette époque. Daussy est au cœur d'une pensée déchirée dont il est aisé de concevoir qu'elle pouvait porter simultanément tous les espoirs et bien des désespoirs : la condition ouvrière, l'évolution du stalinisme vers un réalisme-socialiste toujours plus obtus, le national-socialisme et la guerre, l'espoir révolutionnaire, le surréalisme et son désir de libération de l'esprit.





Hitler, 1944, © R. Daussy







Les raisons de peindre furent alors pour un certain nombre d'artistes toutes plus contradictoires les unes que les autres. La peinture figurative pouvait renvoyer l'image d'une prise de conscience politique immédiate plus forte, l'abstraction devenant une forme d'expression, à l'inverse, nettement évanescente et coupée de la souffrance des peuples. Pour beaucoup, la figure du rêve était devenue terriblement floue. Que pouvait bien se dire un peintre comme Raymond Daussy, proche du Parti Communiste Français, qui ne cessait d'osciller entre sa répugnance pour Hitler et son désir de solidarité avec une internationale prolétarienne, entre la poésie du réel qu'il ne pouvait oublier et la pauvre vie quotidienne si difficilement surmontable ?






Prélude à l'insurrection armée, 1945
© Raymond Daussy







Ce n'est que beaucoup plus tard qu'il pourra exprimer son véritable tempérament, et il le fera aussi bien avec des mots qu'avec la peinture qu'il cherchait en lui. Provincial et de tempérament plutôt solitaire, il a continué d'écrire un certain nombre de notes dont l'arrière-plan reste teinté d'un sentiment poétique du tragique de la vie.





L'invention du feu, 1946 © Raymond Daussy









La figuration, c'est moi. Et j'entends en administrer la preuve, me pliant chaque fois que cela sera nécessaire à l'obligation d'établir le moins d'écart possible entre mon rêve et sa projection visible.

L'œuvre authentique constitue une matière inépuisable ou elle n'est pas. La représentation doit donc comporter une partie d'elle-même que les possibilités de consommation n'atteignent pas.

Passé au filtre de la rêverie active, l'événement reste ce qui, indéfiniment, nous rattache au monde et à nous-mêmes.

                                                             Raymond Daussy, 1984





Eole, 1945 © R. Daussy






Sur le plan artistique, les inventions de R. Daussy ne manquent jamais de puissance créatrice dans l'exploration de son monde intérieur et de ses représentations mentales. Toujours aux aguets de ce qui peut le surprendre aussi bien dans ses rêves qu'au coin de la rue, sa peinture peut faire songer à telle fête du Douanier Rousseau
ou à l'errance statique d'un Edward Hopper qui, pour une fois, aurait dangereusement perturbé le réel.


Raymond Daussy est mort en 2010.
Un livre a paru sur une partie de son travail de peintre, accompagné de ses propres textes, aux bons soins des éditions Natiris et de la galerie Alain Blondel, Paris, 1984.



                                        



                                                                                                      Pierre Vandrepote








2 commentaires:

  1. Raymond Daussy est mort le 14 décembre 2009

    RépondreSupprimer
  2. Bonjour,
    Je suis en train de faire une recherche sur la vie de Raymond Daussy dans le cadre d'un cours d'histoire de l'art. Je ne dispose que du livre auquel vous faites référence ci-dessus. Pourriez-vos m'indiquer vos sources documentaires et me dire si des articles sont parus dans la presse lors de son décès. Je voudrais étudier son oeuvre 'la rencontre '
    Merci
    Jacqueline
    Merci !
    Jacqeline
    'un livre

    RépondreSupprimer